« .....et alors l'homme des
cavernes empoigna sa Selma :..... » elle sursauta en
piaillant, dans son long costume de velours rouge sombre au petit col
blanc dans lequel était fiché le tube de bronze du cou ; hors
d'haleine : « Premièrement tu n'as pas le droit de dire
Selma !... » (je me ratatinai, conscient de ma
culpabilité) : « et alors : quels seraient nos vrais
noms ?! » Attenattends - : « Moi Outhoutzé ? »
(elle approuva de la tête, de sa face toute ronde de chouette) :
« Et toi Poultouké ! » ; un mot comme du
pudding au chocolat, et nous testâmes immédiatement si cela était
à notre goût : « Poultouké : est-ce qué lou
soumon est couit ? » ; et elle me grogna en retour,
lugubre : « Pas tout à fouait ! », ça
marchait donc. L'arbre solitaire au bord de la route à côté du
trou se mit à applaudir et siffler avec un tourbillonnement de
feuilles ; ‘ Flèches à dents de serpent ’ imaginai-je
comme arme (‘ Serpents à dents de flèches ’, là aussi ça
marchait atrocement ; en de funestes entailles). Elle murmurait
précisément ce désir-là, et je la freinai aussitôt :
« Saurais-tu tanner des peaux d'ours, qu'elles soient molles
comme du beurre ? » Elle ne le savait pas ; ne
l'avoua cependant pas, au contraire, elle para avec un : « Et
toi capturer à mains nues un élan de 20 quintaux ? »
Peut-être. « Tch !! » (caustique et
incrédule). « Ou découper lentement ton ennemi mortel en
rondelles ? » : ses regards tels des poignards
d'agathe, allèrent se planter dans le coin d'Osnabrück, visiblement
elle pensait à quelqu'un de précis. Mais elle ne renonçait
toujours pas, remua ses lèvres, réfléchit - : avec entrain :
« Dis, je te ferai des pantoufles en fourrure de loup :
des fourrées ! », s 'approcha aussi, séductrice,
m'appâtant avec une patience très néolithique. « Et moi je
te ferai des bagues en bois de cerf ! » (En homme du
monde). Reconnaissante : « Ah oui ! » Et pour
le miroir ? : « Ben, qu'est-ce que tu crois :
une cupule d'eau du Dümmer ! Ah ces femmes ! » et
elle en fut satisfaite. « Et d'où c'est qu'on aura du
savon ? » et se suspendit anxieuse devant moi :?.
Savon-savon – hn - - - (ha : là : mon Pline ! :
« Avec de la cendre de bois et du suif de chèvre ! ».
Son regard vide ne trahissait aucune espèce d'enthousiasme ;
donc plutôt un certificat de fin d'études avec un « montre
peu de disposition pour l'âge de pierre », et nos visages
s'attouchèrent, encore un peu plus démoralisés).
Arno
Schmidt - Paysage lacustre avec Pocahontas
Traduction
Claude Riehl
MAURICE
NADEAU
– 1994
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