Le chien de Panizza par L. Watt-Owen © 2009 |
On n'imagine pas jusqu'où peuvent aller ces comédiens !
Dernièrement,
j'accompagnais mon maître dans une maison dont j'avais quelques
souvenirs car un certain gaillard m'y avait donné des biscuits. Dès
l'entrée nous tombâmes sur deux individus aux visages balafrés de morve
et de larmes séchées. Ils nous assaillirent de reniflements et de
roulements d'yeux comme ce n'est pas permis. Je me dis aussitôt qu'il se
préparait là quelque fringante comédie. Dans la pièce suivante, le
gaillard (l'homme aux biscuits) était couché de tout son long et raide
comme du bois dans un caisson noir et laqué où il jouait à feindre,
retenant son souffle et ne remuant pas le moins du monde. Comment
peut-on se prêter à un jeu pareil !
Je
vous devine, vous autres petits chiens ! Vous vous imaginez sans doute
qu'après quelque temps le gredin se releva précipitamment, qu'il tendit
la main à ses congénères (dont on voyait clairement les jambes) et qu'il
prononça, les dents nues, ces paroles : " C'était pour rire ! Cela vous
a plu, n'est-ce pas ! ". Eh bien non. On rabattit et on vissa le
couvercle. L'éhonté bouffon se laissa transporter jusqu'en bas des
marches et enfourner dans une de ces fameuses maisonnettes
monstrueusement entichées de deux rosses efflanquées qui le promenèrent
bien pendant une heure aux portes de la ville ! Et pour eux c'est le fin
du fin !
Oscar Panizza, Journal d'un chien
traduit par Claude Riehl et Dominique Dubuy
paru chez Plasma, L'Instant et Ludd
paru chez Plasma, L'Instant et Ludd
Grand merci à Louis Watt-Owen de La Main de Singe
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