[…]
J'ai eu des pensées sur le bonheur, sur les plantes en hiver,
certaines plantes, certaines choses, la nourriture, la politique,
l'eau, sur l'eau, les lacs froids, les fonds des lacs, les lacs du
fond des lacs, sur l'eau qui boit qui prend qui se ferme, sur cette
chose-là, l'eau, beaucoup, sur les bêtes qui se traînent sans
répit, sans mains, sur ce qui va et vient, beaucoup aussi, sur la
pensée de Cahors quand j'y pense, et quand je n'y pense pas, sur la
télévision qui se mélange avec le reste, une histoire montée sur
une autre montée sur une autre, sur le grouillement, beaucoup,
grouillement sur grouillement, résultat : grouillement et
caetera, sur le mélange et la séparation, beaucoup beaucoup, le
grouillement séparé et non, vous voyez, détaché grain par grain
mais collé aussi, sur le grouillement multiplication, et division,
sur le gâchis et tout ce qui se perd, et caetera et caetera, est-ce
que je sais.
[…]
Marguerite Duras – L'amante anglaise
L'imaginaire – Gallimard - 1986
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