Into the Wild - Sean Penn |
Si je n'étais pas allé en Alaska, je ne
sais pas ce que je serais devenu, si je n'avais pas grimpé grimpé
ce sentier caillouteux jusqu'au Domaine des mélèzes où est la
cahute d'Aliocha, je te loue mon matelas, dit-il, ma table, ma
chaise, allez balèze à l'aise dans mes mélèzes !, - et je
suis resté quelques semaines quelques mois, l'hiver est venu, il
fallait chauffer, et l'hiver est parti, et il fallait continuer à
chauffer, un soleil glacé brillait, éblouissant, je dormais
beaucoup, douze quatorze heures sous quatre couvertures, le feu
s'éteignait, l'eau dans le bol gelait, je me chauffais de mon propre
chaud, j'ai toujours eu peur du froid, faisait des cauchemars de
neige & de gelure, mais le ciel était bleu bleu, il y avait la
table et la chaise, et j'étais trop triste pour faire des projets de
départ, aucun élan, je dormais je dormais, à l'abri sous mes
quatre couvertures, et je rêvais, rêvais que j'étais allé en
Alaska, rêvais qu'Aliocha n'était qu'un rêve, rêvais que je
n'étais pas triste, et que j'habitais toujours ma petite province
médiane & tempérée, un pays de cygnes et de cerisiers, et une
grisaille familière qui m'enveloppe, et des trémières qui éclatent
en juillet, mais ici ce n'est pas juillet, ici il n'y a pas de
calendrier, et les jours de la semaine ont des noms que je ne
comprends pas, et puis il n'y a personne à qui je pourrais dire :
tiens, c'est mardi, parce que c'est comme ça que nous disons, pour
le deuxième jour de la semaine nous disons mardi, tout cela me
tourmente et me donne le vertige, et dans l'appentis il n'y a plus le
moindre morceau de sucre, que faire.
Lambert Schlechter – Gare Maritime 2007
Maison de la Poésie de Nantes.
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