sous et contre - Catherine Ferrière Marzio // Emma Kisiel





Il y a des bêtes
frôlées tombées
par :
froids des plombs
rudesses des bruines
faims en terres dures
soifs qui brûlent
peur en broussailles
peur en bitumes
peur en vols
peurs
à découvert
sous tes bruits tes odeurs tes peurs tes froids tes rudesses ta faim tes peurs sous et contre
tes mains tes yeux tes dents tes ongles tes pieds tes fluides ton souffle tes pensées tes rêves sous et contre
ta vie ton existence ta mort ta naissance les leurs sous et contre
tu ne sais pas leurs secrets
tu parles elles ne parlent pas
tu passes elles ne passent pas
tu ne les vois pas
elles te sentent
elles te voient
quand tu plonges dans leur nuit
leur nuit
apprend
ce que tu es
ce que tu n'es pas
apprend
les feux.



train-estuaire





loin maintenant


Pierre Soulages - 29 juin 1979


le poisson:
l'autre pas frais

le bord de route:
tout l'autre

il mate:
l’œil

il jappe:
le renard

il grogne:
le grizzli

il dort:
c'est l'amour

il pue:
il est pas salarié


poing !


bien sûr il bave:
snails

bien sûr il mouille:
la menace


à la machine !

& ça se frotte ça se tord ça se rince ça s'étend

c'est noir encore


c'est ça le noir
c'est tâche
ça marque


il fait avec


c'était tout mélangé ; c'est tout noir.



krrr.


bullshit





écrire

| abattre | les arbres

lire

| détourner | les rivières

corriger

| malaxer | la terre


imprimer

| s'étendre | noir

claironner

| mélanger | tout


ça se rince pas

jamais ça part


| faire | avec

recommencer

déborder



bullshit !




krrr.


stagne




la mer
oubliée

le fumier

gratte:

étale:
déborde:
inonde:

stagne:

arrête
jamais !

arrête:

arrête !



krrr.


what did you expect - Harrys // Ludovic Klein



       "What did you expect" - ©Harrys
                 courtesy of : In Arte Veritas

             


                       dans son âme de lièvre noir, la petite fille rêve de déchirer le monde 
                       avec les dents


Ludovic Klein                   


 

la menace est partout



http://beurklaid.blogspot.fr/

rape my radio





ressource            


au bord de la route





j'connais les fourmis
swing

j'connais les pies
jab

j'connais les corps
punch


uppercut


j'connais les mouches
au bord de la route


j'connais la nuit

j'connais le noir


j'connais l'œil

sténopé



j'empaille

l'oiseau noir


krrr. 


premier jet


*


ruminer-grogner

asperger
miction
3 gouttes

frémir

aboyer-japper

décomposer
fuite
long jet

courir

buriner-terrer

marquer
fuite
ammoniac


pisser-trembler


froid


vider-rempli               r


pisser-stopper


! ! !


parquer-contenir


pisser                           .


krrr.                                                     


  

joy-full




                                 syncope

le bleu sec
le blanc froid
fluo-prothèse
respirateur-acier


à l'aube


                                                                                       krrr.

Robert Gligorov                                  
Koudlam                                               

#5





#4




tu sens qu'aujourd'hui est un bon jour pour semer - Lucien Suel






tu as beaucoup travaillé, le jardin n'existait plus, abandonné depuis des dizaines d'années, juste quelques mètres carrés de chiendent de chardon et d'orties cernés par la profusion des arbustes plantés par les oiseaux, aubépines aux longs couteaux pointus pics à glace dirigés vers tes yeux, prunelliers encastrés les uns dans les autres, églantiers et ronces entortillés autour des troncs, dégringolant du ciel, t'enfonçant des épines dans la tête, "ecce homo", tu t'échines tu t'esquintes tu frappes et coupes et creuses et arraches et scies et brûles et déchiquettes pendant des jours et des jours, t'écroulant sur le dos dans la terre mise au jour, la sueur ruisselle traçant des lignes noires dans la poussière qui recouvre ta poitrine, ton coeur cogne ton coeur cogne, la sueur tombe dans la terre sur le corps des fourmis, tes muscles sont brûlants,
 
tu plantes les pommes de terre, tu traces à la houe les sillons profonds en suivant le cordeau et les courbes de niveaux, ce n’est plus un sillon, presque une tranchée, de chaque côté du canyon, une chaîne de montagnes rectilignes au sommet pointu, tu aperçois des insectes escaladant les parois, araignées et cloportes, tu déposes les pommes de terre en avançant dans le fond de la vallée, une à une, à chaque pas, séparées par l’empreinte de tes bottines, tu prends garde de ne pas casser les germes violets qui ont poussé à la fin de l’hiver, tu plantes des Pompadour des Charlotte des Raja, tu les recouvres en inversant la géographie physique, la vallée devient montagne et inversement ;



 
tu sens qu'aujourd'hui est un bon jour pour semer, tu choisis dans la boîte en carton les sachets de graines en regrettant l'époque où ils étaient en papier kraft sans ce film plastifié, ces photos couleurs criardes et pire, parfois un second sachet métallisé gigogne à l'intérieur du premier, de plus en plus tu produis tes graines toi-même, il te suffit de laisser fleurir quelques plants de salades de carottes de poireaux de radis de navets, bientôt tu seras tout à fait autonome, tu n'auras plus à arpenter les allées des pseudo-magasins verts qui sont d'abord des entrepôts de produits chimiques et de gadgets ;

LucienSuel – Mort d'un jardinier
Éditions de la Table Ronde - 2008